NBA Paris Game 2024 : Le bilan

L’année 2024 s’annonce sportive en France du fait de l’accueil des Jeux Olympiques, mais pas seulement. En effet, ce jeudi 11 janvier à 20h se déroulait un match de saison NBA délocalisé à Paris, opposant la franchise des Cleveland Cavaliers aux Brooklyn Nets. Un événement qui a eu lieu pour la 3ᵉ fois consécutive. 

Cette rencontre a offert aux fans un véritable spectacle, en grande partie grâce à un Donovan Mitchell en feu (45 points, 12 rebonds,6 passes décisives et 4 interceptions) guidant les « Cavs » vers une victoire 111 à 102. « Spida » veut désormais plus que jamais participer aux JO à Paris. Malgré l’enthousiasme que cet événement suscite, il ne s’agit pas uniquement de faire plaisir aux supporters, la NBA y voit l’opportunité de faire toujours plus de profit, au risque de faire passer le sportif au second plan…

La France, un marché important 

Dans l’hexagone, le basketball suscite un engouement grandissant ces dernières années, comme en témoigne la croissance du nombre de licenciés en club passant de 578 207 lors de la saison 2013/2014 à 672 823 sur la saison en cours.

Cette évolution s’explique par plusieurs facteurs, premièrement, l’existence de personnalités françaises reconnues mondialement dans le monde du basket. Par exemple, Tony Parker, ex-meneur de jeu des San Antonio Spurs, champion d’Europe avec la France en 2013 et 4 fois champions NBA (MVP des finales en 2007). 

Bien qu’il ait pris sa retraite sportive, aujourd’hui d’autres athlètes de très haut niveau évoluent dans la « grande ligue » (surnom de la NBA) comme le pivot des Minnesota Timberwolves Rudy Gobert, 3 fois élu meilleur défenseur de la saison et le Rookie Victor Wembanyama (2m22), le phénomène reconnu à l’unanimité comme le plus grand espoir de ce sport depuis la légende Lebron James. 

Ces talents français se développent pour la plupart au sein de la LNB avant d’intégrer la NBA, en effet la ligue française s’impose comme une ligue majeure du basket mondial, forte à la fois de ses jeunes en développement et de ses vétérans. Un autre facteur de développement de la culture du ballon orange en France et la diffusion des rencontres et la couverture de l’actualité, l’émission française NBA Extra diffusé sur Bein Sport, qui propose un débrief des matchs de la nuit en NBA, fait office de référence depuis plusieurs années pour ce qui est de la télévision.

Sur YouTube la chaîne francophone Trashtalk traite également de l’actualité NBA de façon régulière et est suivie par 190 000 personnes. Ce vif intérêt des français pour le basket pousse donc à l’organisation d’évènements d’ampleur dans la capitale française, comme le match annuel délocalisé par la NBA, mais aussi le Quai 54, plus grand tournoi de Streetball au monde qui a lieu tous les ans depuis 2002 à Paris.

Ainsi Bein Sport, qui possède les droits de diffusion des matchs NBA a enregistré un score de +108% d’audiences en 2020-2021, La France se classe quatrième pays en nombre d’abonnés au NBA League Pass et les joueurs français sont les deuxièmes consommateurs au monde du jeu NBA2k24.

La sélection des spectateurs par leur niveau de revenu et de popularité

Comme pour les Jeux Olympiques, les places sont chères, trop chères, à tel point qu’assister à la rencontre annuelle tant attendue sportive est un luxe que tout le monde ne peut pas se permettre.

En effet, les prix vont de 65 euros à 1875 euros ! Sachant que pour avoir des places avec une visibilité correcte, il faut compter au moins 295 euros et surtout faire en fonction des places toujours disponibles.

En ajoutant le prix du transport et du logement pour les spectateurs qui viennent spécialement de province, il peut être moins cher de prendre un billet d’avion d’une compagnie low cost pour les États-Unis, de se loger sur place et de payer une place dans une authentique salle NBA ou les prix débutent à 20 euros pour certaines équipes.

Ce qui fait également grincer des dents, c’est le fait que de nombreuses célébrités, pour la plupart multimillionnaires et sans rapport avec le monde du basket, sont invités gratuitement à ce genre d’événements au premier rang, au détriment des fans aux revenus modestes, opérant un tri des spectateurs, non seulement en fonction du niveau de revenu, mais aussi de popularité des spectateurs.

Pourtant, la nécessité d’être riche ou de se serrer la ceinture pour assister à un évènement sportif d’exception n’est pas inéluctable, en effet la NFL (ligue de football américain des Etats-Unis) a délocalisé des rencontres au Royaume-Uni et en Allemagne en proposant des places à des tarifs bien plus raisonnables.

L’occasion de rappeler que l’accès au sport devient de plus en plus inaccessible chez les individus à faibles revenus, en effet la multiplication des offres d’abonnements qui se partagent les droits de diffusion et l’inflation galopante font de la pratique et de l’intérêt du sport un loisir onéreux.

Une éventuelle et inquiétante extension de la ligue

Le succès financier de ces rencontres délocalisées donne des idées à Adam Silver (Président de la NBA), qui a fait à plusieurs reprises allusion à un élargissement de la ligue au-delà des frontières des États-Unis.

Pour l’instant une seule équipe concourt en NBA alors que la ville n’appartient pas aux USA: Les Toronto Raptors. Mais selon Adam Silver, le championnat pourrait s’étendre notamment jusqu’au Mexique, voire en France. Dans le même temps, les habitants de Seattle attendent toujours le retour de leur franchise historique (les « Supersonics ») déplacée à Oklahoma City sous le nom d’OKC Thunder dans une logique de profit.

La perte de sens du mot « National » dans « National Basketball Association » représente un danger pour les ligues nationales, par exemple la LNB en France en pleine expansion ainsi que pour l’euroligue qui réunit les meilleures équipes d’Europe.

De plus, la variété du basket proposé dans le monde est une richesse que l’internationalisation de la NBA pourrait atténuer. Si la NBA se veut plus « spectaculaire », les baskets européens et asiatiques se veulent plus « académiques », que ce soit au niveau de la manière d’arbitrer ou des règles en elles-mêmes. 

Mais l’enjeu principal reste l’impact écologique qu’une telle expansion aurait. Les nombreux déplacements en jet privé des équipes occasionnent déjà d’importantes émissions de gaz à effets de serre et étendre la ligue à des territoires éloignés augmenteraient encore cet impact.

En plus de réfléchir à ce projet nuisible écologiquement, la NBA apporte des réponses  encore largement insuffisantes à cette problématique.  Pour la saison 2022-2023, les équipes se sont « limitées » à un peu plus de 66 000 kilomètres. Sur l’ensemble de la ligue, ce sont donc environ 90 000 kilomètres de moins par rapport à la saison précédente. 

Seuls les Portland Trail Blazers font des efforts remarquables en matière d’écoresponsabilité. Depuis 2005, l’équipe de l’Oregon à réduire son empreinte environnementale : recyclage de maillots et du surplus de nourriture, réduction des dépenses d’eau et d’énergie, ou encore salle certifiée « écologique ». Mais son exemple est encore loin d’être généralisé.

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